Sigmund Freud. Du regard à l’écoute
Cette exposition, proposée à l’occasion des vingt ans du mahJ, est la première présentée en France sur Sigmund Freud (1856-1939). Par un ensemble de 200 pièces – peintures, dessins, gravures, ouvrages, objets et dispositifs scientifiques –, dont des œuvres majeures de Gustave Courbet (L’Origine du monde), Oskar Kokoschka, Mark Rothko ou Egon Schiele, elle jette un regard nouveau sur le cheminement intellectuel et scientifique de l’inventeur de la psychanalyse.
En France, l’enseignement de Freud est d’abord diffusé par les cercles littéraires, surréalistes en particulier, dans le sillage du symbolisme de la fin du XIXesiècle. Or cette réduction à la littérature ignore la rationalité dont se réclame la doctrine freudienne. Le parcours de l’exposition insiste donc sur les années viennoises puis parisiennes de Freud, héritier de Darwin, qui débute sa carrière en tant que neurologue, et dont l’intérêt pour la biologie ne va cesser de croître – Une leçon clinique à la Salpétrière d’André Brouillet (1857-1914) et le baquet à magnétiser de Franz Anton Mesmer (1734-1815), présents dans l’exposition, sont prêtés tous deux pour la première fois. Ses premières recherches s’enracinent dans la tentative de tracer des schémas et des esquisses souvent semblables à ceux que les neurosciences s’efforcent alors de dessiner pour expliquer la croissance et le développement des neurones et le fonctionnement du cerveau.
L’exposition fait redécouvrir l’invention de la psychanalyse. Si cette démarche est née de l’observation éminemment visuelle des symptômes, photographiés, dessinés, mis en scène autour de Jean-Martin Charcot (1825-1893) à la Salpêtrière, elle trouve sa spécificité et son efficacité à refuser l’image. Elle s’épanouit dans la seule écoute, dans les associations de mots, en l’absence de toute représentation visuelle.
Le lisible contre le visible, le mot contre l’image : Freud se pose ici en héritier de Moïse, grand briseur d’images. La spiritualité juive, à défaut d’une foi et d’une pratique, irrigue ses travaux, de L’interprétation des rêves – ouvrage dont l’herméneutique talmudique n’est pas absente –, jusqu’à l’essai final, Moïse et le monothéisme. Si Freud lui-même, né dans une famille juive originaire de Galicie gagnée par les idées de la Haskalah (les Lumières juives), affirme son athéisme et tient sa production scientifique à l’écart de son ascendance juive, tout comme du milieu viennois où il a vécu, c’est d’abord pour faire de la psychanalyse une science universelle, détachée de tout particularisme religieux ou culturel. Mais la démarche psychanalytique n’est pas étrangère à la tradition interprétative propre au judaïsme.
L’exposition bénéficie de prêts exceptionnels du musée Freud de Londres, du musée d’Orsay et du musée national d’Art moderne, ainsi que de grands musées autrichiens et allemands (Leopold Museum, Österreichische Galerie Belvedere, Vienne ; Museum der Bildenden Künste, Leipzig…).
Elle est accompagnée d’un riche programme (rencontres, table rondes, conférences, projection, activités pour le jeune public…).
Son catalogue est publié avec les éditions Gallimard.
Commissariat : Jean Clair, Académie française
Conseil scientifique : Laura Bossi, Laboratoire Sphère – Université Paris Diderot et Philippe Comar, ENSBA
Coordination : Virginie Michel, assistée de Camille Filaferro, mahJ