Elle(s). Poétesses intermédia en France de 1959 à 2023

Du 21.10.2022 au 27.11.2022 Commissaire(s): François Massut Musée Rimbaud (Charleville-Mézières, France)

Donc le poète est vraiment voleur de feu.
Il est chargé de l’humanité, des animaux même ; il devra faire sentir, palper, écouter ses inventions ; si ce qu’il rapporte de là-bas a forme, il donne forme ; si c’est informe, il donne de l’informe. Trouver une langue ;
[…] La Poésie ne rythmera plus l’action ; elle sera en avant. […]
Quand sera brisé l’infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle, l’homme, – jusqu’ici abominable, – lui ayant donné son renvoi, elle sera poète, elle aussi ! La femme trouvera de l’inconnu ! Ses mondes d’idées différeront-ils des nôtres ? Elle trouvera des choses étranges, insondables, repoussantes, délicieuses ; nous les prendrons, nous les comprendrons.
Arthur Rimbaud, Fragments de la lettre dite « lettre du Voyant », 15 mai 1871 à Charleville.

 

Un Coup de Dés jamais n’abolira le hasard (1897), « poème-constellation[1] » de Mallarmé, est considéré comme la « matrice de toute poésie d’avant-garde[2] » en ce qu’il met en espace le poème à l’échelle du livre entier. À sa suite, la poésie prend de nouvelles dimensions avec l’apparition dans les années suivantes des poésies phonétiques, typographiques, idéogrammatiques et visuelles.

Tout au long du 20e siècle et au début du 21e, de nombreux poètes et poétesses à travers le monde ont continué d’innover et d’inventer de nouvelles formes de poésies dites expérimentales, qu’elles soient visuelles, sonores, actions/performatives et numériques.

L’exposition Elle(s) : Poétesses Intermédia en France de 1959 à 2023 au Musée Rimbaud propose cette « poésie hors du livre » où la langue, explorant ses dimensions matérielles, sort de son carcan de papier, flirte avec les images, le son et le corps, en passant de la galaxie Gutenberg à la galaxie Cyber.

Cette notion d’Intermédia[3], développée par l’artiste-poète et co-fondateur du mouvement Fluxus Dick Higgins dès les années 60, met en avant des artistes dont la création et les œuvres sont à l’intersection de plusieurs médiums artistiques.

Ces poétesses, vivant en France des années 50 à aujourd’hui, ont souvent été reléguées, voire oubliées, alors que leurs œuvres « étranges, insondables, repoussantes, délicieuses », comme l’avait anticipé Rimbaud, sont singulières, novatrices, provocantes et méritent amplement d’être redécouvertes, exposées et partagées.

Cette exposition dédiée aux poésies expérimentales féminines, première dans une institution en France, ne pouvait se dérouler qu’au Musée consacré au poète Voyant.

François Massut pour Poésie is not dead 

Remerciements : aux poétesses pour leur confiance et leur enthousiasme, aux soutiens de la Ville de Charleville-Mézières, son Musée Arthur Rimbaud, sa directrice Lucille Pennel et le personnel des Musées, à Anne-Christine Royère, maîtresse de conférences à l’Université de Reims Champagne-Ardenne, spécialiste des poésies expérimentales, et aux ayants-droits et prêteurs des œuvres exposées : Violette Garnier, Anne-Christine Royère, Frédéric Acquaviva, Laurent Cauwet et Jacques Donguy.