De Stefan Zweig à Martin Bodmer : la collection [in]visible
L’exposition qui se tiendra à la Fondation Jan Michalski du 24 avril au 5 septembre 2021 s’offre comme une occasion rare de voir l’une des plus importantes collections de manuscrits littéraires constituées au XXe siècle. L’écrivain autrichien Stefan Zweig (1881-1942) a réuni dans un ensemble éclectique, qui reflète son intérêt marqué pour la diversité des littératures européennes, plusieurs centaines de textes autographes des auteurs qu’il admirait le plus : brouillons d’œuvres célèbres ou inédites, notes préparatoires, billets intimes ou encore manuscrits destinés à l’imprimeur, de la Renaissance jusqu’à ses contemporains. Cette galerie personnelle des « plus grands maîtres de tous les temps » représentait également pour lui la possibilité de sonder les mystères de la création artistique, une quête constante au cours de sa vie mouvementée.
En rendant à nouveau visibles les contours d’une collection longtemps considérée comme disparue, l’exposition interrogera également ce qui pouvait rapprocher dans leurs projets respectifs Stefan Zweig et le bibliophile suisse Martin Bodmer (1899-1971), à partir du moment où celui-ci fit l’acquisition de ce patrimoine exceptionnel, sur lequel planait la menace des pillages nazis. En héritiers de Goethe, les deux hommes partageaient une conception « magique » du manuscrit autographe comme lieu d’évocation de « génies » à travers leurs traces écrites, mais aussi une vision humaniste de la Weltliteratur (littérature mondiale) comme nouvel horizon culturel face à la montée brutale des nationalismes.