Inspirations littéraires de l’exposition – Appel à contributions – Revue Captures
Inspirations littéraires de l’exposition
s. dir. Corentin Lahouste (UCLouvain – CRI) & David Martens (KU Leuven – MDRN), pour les RIMELL
Appel à contributions
Depuis une vingtaine d’années, les interactions entre le monde littéraire et celui de l’exposition et des musées ont connu un essor considérable, sous différentes formes. Outre les nombreuses expositions consacrées à la littérature – écrivain·e·s, œuvres, thèmes –, qui contribuent à sa patrimonialisation et qui sont probablement les plus nombreuses, d’autres types d’expositions mobilisent une matière littéraire pour se constituer, en déclinant des scénographies d’œuvres ou d’installations qui, en tant qu’ensembles d’objets signifiants, actualisent et prolongent un ou plusieurs textes littéraires.
Les formes de cette inspiration littéraire de l’exposition sont elles-mêmes particulièrement diversifiées. Parmi les principales tendances qui paraissent se dégager, certaines participent de ce que Pascal Mougin a identifié comme une « tentation littéraire de l’art contemporain ». Dans ce contexte, les expositions, jouant souvent du pouvoir d’attraction d’un auteur ou d’une autrice devenu·e culte, prennent pour point de départ une œuvre littéraire, en donnant forme d’exposition à certaines de ses lignes de force, à l’instar de l’exposition Amberes, présentée au MHKA d’Anvers lors de l’été 2019, inspirée par le roman éponyme de Roberto Bolaño autour duquel elle a été façonnée en adoptant la multiplicité de perspectives que le livre mobilise. On pense également à l’exposition Rester vivant, mise sur pied par Michel Houellebecq au Palais de Tokyo en 2016 – présentée comme un « scénario qui conduit le visiteur au travers des obsessions de l’écrivain », elle offrait ainsi « une plongée dans le cerveau et le monde de ce créateur protéiforme ». On relèvera encore, dans cette lignée, l’exposition collective Dépenses (2016-2017) présentée à Labanque de Béthune — espace d’art contemporain français centré sur la production et la diffusion d’arts visuels — articulée autour du travail et de l’œuvre de Georges Bataille.
Certaines expositions mobilisent une matière littéraire – l’idée de littérature – de façon plus générale, voire anonyme, comme pour l’exposition Bacon en toutes lettres présentée au Centre Pompidou en 2019, La voix libérée – Poésie sonore au Palais de Tokyo en 2019, ou CODE/POÉSIE. Digital Lyric (2020) au Château de Morges (Suisse), ou encore celle confiée à Valérie Mréjen par l’IMEC dans le cadre d’une carte blanche : intitulé Soustraction (IMEC, automne 2019), le projet a été présenté comme « aussi plastique que littéraire », et s’inscrivait dans une dynamique où le geste de relecture et du faire fiction s’avère central, bien que construit en dehors de la forme livresque canonique. Si certaines de ces expositions sont accueillies et réalisées par des lieux dédiés à l’art contemporain (MHKA, Palais de Tokyo, Centre Pompidou), d’autres émanent d’institutions plus centrées sur la patrimonialisation de la littérature (IMEC, BNF, AML). À cet égard, les Maisons d’écrivains ne sont pas en reste ; ainsi de la Maison de Balzac, dont la programmation fait de ce principe un ressort, comme le montre, par exemple, l’exposition La Comédie humaine d’Eduardo Arroyo (2019).
Cette mobilisation de modèles littéraires dans l’exposition se situe à la croisée de domaines dont les systèmes de valeurs, les traditions et les modes de fonctionnement ne se recoupent pas nécessairement. Leurs interactions et les productions qu’elles proposent soulèvent par conséquent nombre d’interrogations : Quelles sont les motivations de ces recours à la littérature ? Quelles en sont les formes privilégiées (focalisation sur un écrivain ?, sur une œuvre particulière ?) ? Comment la littérature peut-elle alimenter le geste curatorial ? Dans quelle mesure de telles entreprises ne relèvent-elles pas d’une forme d’instrumentalisation de la littérature (par la mise en avant d’un grand nom, par exemple) ? Comment la dimension littéraire s’y trouve-t-elle non seulement redéployée, mais aussi justifiée ? Dans quelle mesure assiste-t-on (ou non) à des formes de littérarisation de l’exposition ? Quelles sont les institutions qui privilégient les expositions inspirées par la littérature et pour quelles raisons ? Observe-t-on par exemple des disparités entre les institutions à vocations artistiques et celles d’orientation littéraire ? Dans quels types de programmation de telles expositions prennent-elles place ? Quelle en est la réception ? Et, plus largement, quelle est la place de la littérature, de nos jours, dans le monde des musées et centres d’art ?
C’est à ces questions qu’un futur dossier de la revue Captures serait consacré, dossier dont nous cherchons à compléter la liste des contributeurs-trices. Les propositions d’articles (250 à 400 mots, avec bio-bibliographie) sont à envoyer pour le 20 août 2020 à Corentin Lahouste (corentin.lahouste@uclouvain.be) & David Martens (martens.david@kuleuven.be).
Les articles seraient à remettre le 1er mars 2021, pour une publication prévue à l’automne 2021.
Captures est une revue à comité de pairs dédiée à la publication de travaux consacrés à l’analyse de problématiques liées aux figures, théories et pratiques de l’imaginaire, sans limitations territoriales ou nationales. S’y voient publiés des articles à la croisée des études littéraires et cinématographiques, des sciences humaines, de l’histoire de l’art et des arts visuels et médiatiques. Il s’agit d’une revue francophone qui accueille également des publications écrites en anglais.Tous les articles parus dans Captures font l’objet d’un processus d’évaluation par les pairs à double insu. Ils mettent en valeur la dimension théorique et culturelle des rapports que le sujet entretient avec le monde contemporain. Cette relation s’établit à travers des figures et des mythes, des fictions et des croyances, des représentations sociales, culturelles et des mutations technologiques, des textes et des images, des lieux et des interfaces numériques, autant de formes et de phénomènes constitutifs d’un imaginaire contemporain.