Festival d’Angoulême – 49e édition

Du 17.03.2022 au 20.03.2022 Commissaire(s): Romain Gallissot, SONIA DÉCHAMPS, AUGUSTIN ARRIVÉ, JEAN-BAPTISTE BARBIER, ANTOINE GUILLOT, Olivier Bron, Stéphane Beaujean, BENOÎT PEETERS, JULIEN MISSEREY, Jean-Pierre Mercier, ROMAIN BRETHES, LOO HUI PHANG, Xavier Guilbert, LÉOPOLD DAHAN, FREDERICO ANZALONE Cité internationale de la bande dessinée et de l’image

MORTELLE ADÈLE, L’EXPOSITION INTERDITE AUX NAZEBROQUES

CHAIS MAGELIS

COMMISSAIRE
ROMAIN GALLISSOT

SCÉNOGRAPHE
ÉLODIE DESCOUBES

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

Mortelle Adèle, le phénomène des cours d’écoles, s’invite au Festival d’Angoulême dans le cadre d’une exposition interactive et piquante.

Depuis quelque temps, les enfants ne parlent que de Mortelle Adèle, une héroïne qui n’a pas sa langue dans sa poche et affiche un caractère bien trempé. Plébiscitée par plus de 9 millions de jeunes lecteurs, l’héroïne du scénariste Antoine Dole, alias Mr Tan, illustrée aujourd’hui par la dessinatrice Diane Le Feyer, s’active de tous côtés pour permettre à ses fans d’aller à sa rencontre. Née en bande dessinée aux éditions Bayard, Mortelle Adèle s’offre désormais à eux en romans, livre audio, jeux de société, magazine… Dernièrement, elle a même sorti un album de chansons composées par Aldebert ; et elle sera bientôt à la télévision. Autant dire que cette jeune fille survitaminée, issue de la bande dessinée, est prête à partager son univers et sa perception du monde avec tous ceux désireux de défier la norme et les diktats !

C’est avec enthousiasme que le Festival d’Angoulême consacre à Mortelle Adèle sa première exposition. Elle sera à son image. Pour entrer dans le très select Club des Bizarres, dont les membres doivent célébrer leurs différences fièrement, les visiteurs devront se soumettre à plusieurs épreuves, et relever quelques défis. Ils pourront alors se plonger dans sa réalité, faire connaissance avec les autres personnages de la série, et laisser libre cours à leur part de bizarrerie !

Adèle, c’est la reine des bêtises et la désobéissance incarnée, mais c’est aussi une héroïne courageuse qui n’hésite pas à s’affirmer ! L’un de ses points forts -et ils sont aussi nombreux que ses taches de rousseur- est sans aucun doute sa répartie dévastatrice. Les deux pieds bien ancrés dans son époque, elle est prête à faire la révolution, s’invente un quotidien qui refuse les normes, et n’hésite pas à tenir tête aux adultes.

La jeune fille a déclaré la guerre aux légumes, aimerait bien se débarrasser de ses parents, et être élue présidente de la galaxie. Rien que ça ! Mais sous ses apparences de petite tornade, Adèle est aussi une enfant touchante et pleine d’imagination. Peut-être souhaite-t-elle seulement trouver sa place dans une société trop sage et uniformisée pour son tempérament explosif… Pour le savoir il faut juste prendre le temps de découvrir sa personnalité et ses aventures. C’est justement l’invitation formulée par cette exposition inédite. Alors vive les bizarres, et pas de pitié pour les nazebroques !

SOUS LA PLUME D’AUDE PICAULT

VAISSEAU MOEBIUS

COMMISSAIRES
SONIA DÉCHAMPS & AUGUSTIN ARRIVÉ

SCÉNOGRAPHE
MARIE CORBIN

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

De Moi je à Amalia, Aude Picault affirme un peu plus son style à chaque nouvel album, entre récit de l’intime et dessin épuré. Cette exposition retrace un parcours discret, caractérisé par la finesse du trait, mais aussi celle de l’esprit.

Après Transat (Delcourt, 2009) Fanfare (Delcourt, 2011) et Idéal standard (Dargaud, 2017), Aude Picault publie au mois de janvier 2022 aux éditions Dargaud son quatrième récit au long cours, Amalia. L’occasion pour le Festival d’Angoulême de mettre en avant l’œuvre de celle qui excelle à raconter le quotidien au féminin. Après des études aux Arts-Déco à Paris, Aude Picault, qui n’avait jamais rêvé de devenir autrice de bande dessinée, fait ses premiers pas professionnels en tant que graphiste dans une agence de communication. Ayant le sentiment d’avancer sans but, et ne supportant pas franchement le système hiérarchique, la jeune femme décide de changer de métier et fait le choix de raconter des histoires. Elle s’oriente naturellement vers la bande dessinée, un médium qu’elle considère comme un terrain d’expression génial.

En 2004, Aude Picault publie Moi je (Vraoum), des carnets dans lesquels elle note, avec l’humour qui la caractérise déjà, ses moments de perplexité face au quotidien. Cette première œuvre vient d’être rééditée chez Dargaud. Elle continue sur sa lancée avec des ouvrages parfois plus durs, comme Papa, publié à L’Association (2006), où elle évoque le suicide de son père. Audacieuse, l’autrice s’essaye à l’érotisme, inaugurant la collection BD Cul des Requins Marteaux avec Comtesse en 2010 ; puis récidivant avec Déesse, en 2019. De plus en plus, elle préfère à l’autobiographie la fiction.

Pensée comme un écrin, l’exposition consacrée à Aude Picault suit son évolution en tant qu’autrice, évoquant sa quête de sens et d’authenticité, en portant une attention toute particulière à ses obsessions et aux mécanismes créatifs qu’elle met en œuvre. Cherchant à créer une relation d’intimité entre l’univers délicat de la dessinatrice et les visiteurs, l’exposition montre comment Aude Picault a fait évoluer son art de la bande dessinée, passant de carnets intimes, qui n’avaient pas vocation à être publiés, à des récits structurés, qu’elle décidera de révéler au public. Ce faisant, l’autrice a peu à peu affirmé son style, qui tend vers l’épure, à travers une maîtrise toujours plus grande de la plume, des pleins et des déliés.

CHRISTOPHE BLAIN, DESSINER LE TEMPS

VAISSEAU MOEBIUS

COMMISSAIRES
ANTOINE GUILLOT, SONIA DÉCHAMPS & JEAN-BAPTISTE BARBIER

SCÉNOGRAPHE
MARIE CORBIN

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

Auteur phare de la nouvelle bande dessinée, Christophe Blain se voit cette année consacrer une grande rétrospective. L’occasion de (re)découvrir la maetria de son dessin, dont l’énergie transcende chaque séquence qu’il met en scène. Placée sous le signe du cinéma, cette exposition illustre également l’omniprésence du 7e art dans ses œuvres.

Les deux tomes de Quai d’Orsay (Dargaud, 2010 et 2011) sont un condensé de ce qui fait l’art de Christophe Blain : un trait virtuose, une attention portée au rythme des dialogues et à la gestuelle des personnages et, surtout, une énergie folle qui se dégage de chaque planche. Ni le public, ni la critique ne s’y sont trompés. En 2013, le tome 2 de Quai d’Orsay (coscénarisé par Abel Lanzac) a décroché le Fauve d’or au Festival d’Angoulême, quelques mois avant la sortie en salles de son adaptation cinématographique. Un événement qui a remis en lumière l’autre passion dévorante de Christophe Blain : le 7e art. Omniprésent dans ses œuvres, c’est l’une des obsessions du dessinateur. En feuilletant les pages du Réducteur de vitesse (Dupuis, 1999), d’Isaac le pirate (Dargaud, 1999 à 2005 – Prix du Meilleur Album à Angoulême en 2002 pour le premier volume), ou encore d’un Donjon Potron-Minet, (Delcourt, 2001) les cinéphiles remarqueront des visages empruntés à des acteurs, notamment américains, ou encore des scènes inspirées des films qui le hantent, tels que Butch Cassidy et le Kid de George Roy Hill, Rio Bravo d’Howard Hawks, La Sirène du Mississipi de François Truffaut, ou encore Le Bonheur d’Agnès Varda.

Un genre suscite particulièrement l’admiration de Christophe Blain : le western. Il explore ce paradis perdu à travers sa série Gus, et plus récemment avec sa reprise de Blueberry (Dargaud, 2019), aux côtés de Joann Sfar. Ainsi, parce qu’il n’est pas un de ses albums qui n’ait une motivation forte de cinéma, le Festival d’Angoulême a fait appel aux films fétiches de Christophe Blain pour décrypter son processus de création. Un fil rouge et souterrain qui permet d’aborder les différentes thématiques qui lui sont chères, comme les océans et le Paris interlope dans Isaac le pirate, le western sentimental et mélancolique dans Gus (Dargaud, 2007 à 2017), les femmes fortes et indépendantes dans La Fille (Gallimard, 2013) (et plus généralement dans l’ensemble de son œuvre), la vie politique dans Quai d’Orsay, la gastronomie dans En cuisine avec Alain Passard (Gallimard BD, 2011), ou encore le dérèglement climatique dans Le Monde sans fin (Dargaud,2021).

SIMON ROUSSIN, LA GRANDE AVENTURE !

PAVILLON JEUNES TALENTS®

COMMISSAIRES
OLIVIER BRON & SONIA DÉCHAMPS

SCÉNOGRAPHE
ÉDITIONS 2024

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

En dix ans et autant de livres, Simon Roussin est parvenu à faire entendre sa voix, entre amour passionné de la bande dessinée classique et récits d’auteur cherchant sans cesse à explorer de nouveaux territoires. Cette exposition retracera l’ensemble de son parcours artistique, s’intéressant notamment à la figure du héros, moteur et dépositaire du récit d’aventure, colonne vertébrale de sa réflexion artistique.

Né en 1987, Simon Roussin grandit dans la région lyonnaise. C’est aux Arts décoratifs de Strasbourg, dont il sort diplômé en 2011, qu’il fait la connaissance de Marion Fayolle et de Matthias Malingrëy, avec qui il fonde la revue Nyctalope. Neuf numéros voient le jour entre 2007 et 2017. Fort de cette expérience formatrice, Simon Roussin n’attend pas la fin de ses études pour publier Robin Hood (L’Employé du moi, 2010), puis surtout, l’année suivante, Lemon Jefferson et la Grande Aventure, aux éditions 2024, sises dans la capitale alsacienne. Flamboyant récit post-apocalyptique mis en couleur aux feutres, l’album est retenu en 2012 dans la sélection officielle du Festival d’Angoulême.

En 2012 également paraît Heartbreak Valley (éditions 2024), un road-trip étrange dans une nuit sans fin, traité via un clair-obscur dépouillé qui tranche nettement avec ses précédentes productions. Pour autant, ces trois premiers livres font déjà apparaître avec force les lignes directrices du travail de Simon Roussin : l’envie de rendre hommage à ses lectures d’enfance, un talent magistral pour la couleur et la lumière et, surtout, une grande audace graphique et narrative.

La figure du héros, moteur du récit d’aventure classique dans lequel il a baigné, s’impose déjà comme la colonne vertébrale de son œuvre. On la retrouve par la suite dans ses livres jeunesse (Les Aventuriers et Le Bandit au colt d’or, éditions Magnani), aussi bien que dans ses deux albums abordant l’épopée de l’Aéropostale, à savoir Prisonnier des glaces et Xibalba (éditions 2024, en sélection officielle au Festival d’Angoulême en 2019). Assumant avec sincérité son amour de la bande dessinée classique mais également du cinéma, Simon Roussin a su reprendre à son compte les codes du genre, sans pour autant jamais dévier de son propre chemin artistique. Livre après livre, il a ainsi développé une voix singulière et affirmée, en particulier à travers des coups de génie scénaristiques, un dessin subtil et une mise en couleur d’une radicalité déconcertante. Autant d’éléments qui peuvent séduire les lecteurs amoureux d’une BD traditionnelle, tout en les invitant à explorer de nouveaux territoires.

CAMILLE JOURDY & LOLITA SÉCHAN, CACHÉES OU PAS !

HÔTEL SAINT-SIMON

COMMISSAIRES
SONIA DÉCHAMPS & STÉPHANE BEAUJEAN

SCÉNOGRAPHE
THOMAS GABISON

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

Le temps d’un livre, Lolita Séchan (Une échappée de Bartok BilobaLes Brumes de Sapa) et Camille Jourdy (Prix Révélation en 2010 pour Rosalie Blum, et Fauve Jeunesse en 2020 pour Les Vermeilles) associent leurs univers : un noir et blanc vibrant pour la première, des couleurs flamboyantes pour la seconde. Publié aux éditions Actes Sud BD, Cachée ou pas, j’arrive ! réunit ainsi leurs deux personnages fétiches, la taupe Bartok Biloba et la petite fille chat Nouk, le temps d’une rocambolesque partie de cache-cache.

Récompensé en juin 2021 à la Foire du livre de Bologne, cet album jeunesse enveloppant et ludique a désormais les honneurs du Festival d’Angoulême. L’hôtel Saint-Simon accueillera donc les deux autrices pour une exposition immersive à destination de toute la famille. Tout d’abord, au rez-de-chaussée, les univers de Camille Jourdy et Lolita Séchan se répondent en face-à-face.

Dans cette salle scindée en deux, moitié en couleurs, moitié en noir et blanc, les œuvres des autrices et leurs influences sont présentées avec une sélection de planches originales. À travers cette déambulation, ce sont autant leurs parcours distincts que leurs obsessions communes, comme le poids de la famille, l’hypocondrie, l’amour de la banlieue ou encore le goût du carnavalesque, qui se font jour. Le premier étage, lui, est naturellement consacré au livre Cachée ou pas, j’arrive ! et à la manière dont cette bande dessinée pour enfants a littéralement fusionné ces deux univers, dessins et écritures, en un récit incroyablement luxuriant et cohérent. Tous les secrets de fabrication, qui comportent de nombreuses étapes, seront dévoilés au cœur d’une scénographie immersive qui plongera petits et grands au cœur de l’imaginaire du livre et de ses deux autrices.

BUILDING, CHRIS WARE

ESPACE FRANQUIN – SALLE BUNUEL

COMMISSAIRES
BENOÎT PEETERS, JULIEN MISSEREY & SONIA DÉCHAMPS

SCÉNOGRAPHE
ATELIER MACIEJ FISZER

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

Auteur d’une inventivité exceptionnelle, Chris Ware, Grand Prix 2021 du Festival, explore méthodiquement depuis près de trente ans toutes les potentialités du médium bande dessinée. Élaborée en étroite collaboration avec Chris Ware, cette rétrospective cherche à guider les visiteurs à travers l’œuvre de l’auteur et, par ce biais, à les faire pénétrer au cœur des arcanes du 9° art.

Né en 1967 à Omaha, dans le Nebraska, Chris Ware vit depuis trente ans à Chicago, ville où il a emménagé en 1991 afin d’y poursuivre ses études. S’il avait auparavant déjà placé quelques strips dans la presse, ainsi que quatre pages dans RAW, la revue dirigée par Art Spiegelman et Françoise Mouly, c’est à travers l’une des plus insolites aventures éditoriales de la bande dessinée qu’il lance véritablement sa carrière. À partir de 1993, il publie, de manière discrète, une série de fascicules aux formats très divers intitulée Acme Novelty Library. Les quinze premiers opus sont édités chez Fantagraphics Books ; les cinq suivants par Chris Ware lui-même. C’est dans cette anthologie baroque qu’il développe des personnages comme Quimby the Mouse, Potato Guy, Sparky et, surtout, Jimmy Corrigan.

En 2000, la parution chez Pantheon Books de Jimmy Corrigan: the Smartest Kid on Earth (Delcourt, 2002), sort brusquement Chris Ware de l’anonymat. Cet album de 380 pages est acclamé par la critique, à la fois aux États-Unis et à l’international (en 2003, sa traduction française décroche successivement le Fauve du Meilleur Album à Angoulême et le Prix de la critique). Sa facture, son contenu et la thématique qu’il aborde frappent par leur originalité. Par la suite, le coffret Building Stories (Delcourt, 2014), qui contient quatorze objets imprimés de tailles différentes que le lecteur peut lire dans l’ordre qu’il souhaite, puis le magistral Rusty Brown (Delcourt, 2020) viennent confirmer l’inventivité et la générosité de Chris Ware. Bien au-delà du formalisme, ses livres ouvrent à la bande dessinée l’expression romanesque d’un temps infinitésimal, plus intérieur qu’intime. Dans ses histoires, les sensations de la vie palpitent de façon touchante et mélancolique, avec la complicité irremplaçable d’images dessinées quasiment comme des pictogrammes.

RENÉ GOSCINNY SCÉNARISTE, QUEL MÉTIER !

MUSÉE D’ANGOULÊME

COMMISSAIRES
ROMAIN BRETHES & JEAN-PIERRE MERCIER, AVEC LA PARTICIPATION D’AYMAR DU CHATENET, DE JACQUES DÜRRENMATT ET DE YANN POTIN, ET LES CONTRIBUTIONS D’ANNE GOSCINNY ET DE PASCAL ORY

SCÉNOGRAPHE
STUDIO GOLEM

PRODUCTION
CATALOGUE D’EXPOSITION

9E ART+/ FIBD

Pour la première fois, René Goscinny est directement mis à l’honneur dans une exposition entièrement consacrée à son travail de scénariste. Cette rétrospective exceptionnelle dévoile les secrets de la poétique goscinnienne, le caractère polygraphe de son œuvre, et les coulisses de ses collaborations avec les plus grands noms du 9e art.

AstérixLucky LukeIznogoudLe Petit NicolasLes Dingodossiers…. Ces bandes dessinées font partie intégrante du patrimoine. Si beaucoup ont déjà fait l’objet d’une exposition, ce n’était jusqu’à présent pas le cas du travail de scénariste de René Goscinny (1926-1977). Pour la première fois, une rétrospective inédite lève le voile sur la poétique goscinnienne et révèle les secrets de fabrication de celui qui a marqué à jamais l’art de la bande dessinée. De ses péripéties américaines à ses collaborations étroites avec les plus grands artistes du 9° art de son temps, tels Albert Uderzo, Morris ou encore Gotlib, ce sont plus de deux décennies d’écriture frénétique que retrace cette exposition exceptionnelle. Une période au cours de laquelle René Goscinny a imaginé plus de 450 scénarios de bande dessinée.

L’exposition met ainsi en lumière le caractère polygraphe de l’œuvre de Goscinny, qui en fait l’un des dignes héritiers des feuilletonistes du XIXe siècle. Elle révèle également les ressorts de son écriture, entre vis comica, justesse des dialogues, équilibre entre les personnages et sens du découpage imparable. Enfin, ce parcours à la découverte du génie goscinnien se penche sur l’un des aspects les moins connus de sa carrière, à savoir son implication dans la lutte pour les droits d’une profession aux contours encore flous. Un combat qui a participé de la reconnaissance de la bande dessinée comme un art à part entière.

LOO HUI PHANG, ÉCRIRE EST UN MÉTIER

ESPACE FRANQUIN

COMMISSAIRE
LOO HUI PHANG

SCÉNOGRAPHE
ATELIER 1 : 1

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

À travers cette exposition thématique, la scénariste Loo Hui Phang donne à comprendre la nature de son métier. La lauréate du Prix René Goscinny 2021 se penche tout particulièrement sur la singularité de la narration en bande dessinée.

Née en 1974 au Laos, Loo Hui Phang a toujours eu le goût de l’écriture. Comme tout l’intéresse, elle ne s’est jamais limitée à un seul et unique registre, mais a toujours cherché à explorer avec appétence différents médias. Elle compose des pièces de théâtre, des spectacles hybrides, ou encore des installations. En 2019, elle franchit une nouvelle étape avec L’Imprudence, son premier roman publié chez Actes Sud. Mais c’est certainement la bande dessinée qui a le plus nourri sa créativité protéiforme. Elle a été amenée à collaborer avec différents dessinateurs, comme Cédric Manche (Panorama, par la suite adapté en moyen métrage pour Arte ; J’ai tué Geronimo), Philippe Dupuy (Une élection américaine ; Les Enfants pâles L’Art du chevalement Nuages et pluie), Mickaël Sterckeman (Cent mille journées de prières) ou encore Frederik Peeters pour qui elle écrit L’Odeur des garçons affamés (Prix Landerneau 2016).

En 2021, Loo Hui Phang remporte le Prix René Goscinny pour Black-out (Futuropolis, 2020), réalisé avec le dessinateur Hugues Micol. L’occasion pour elle de profiter de l’exposition qui lui est consacrée cette année – et dont elle est commissaire – pour évoquer la nature concrète d’un métier encore très largement méconnu.

L’autrice souhaite ainsi s’adresser directement aux lecteurs, dont bon nombre ne parviennent pas véritablement à cerner la nature, les contraintes et les limites de la profession de scénariste de bande dessinée. Certains croient y voir une activité dilettante ; d’autres l’apparentent à une écriture romanesque, cinématographique ou historique « aménagée ». La plupart sont ignorants de la grammaire singulière de la narration en bande dessinée.

SHIGERU MIZUKI, CONTES D’UNE VIE FANTASTIQUE

MUSÉE D’ANGOULÊME

COMMISSAIRES
LÉOPOLD DAHAN & XAVIER GUILBERT

SCÉNOGRAPHES
ROMAN GIGOU & MANON RAVEL

PRODUCTION
CATALOGUE D’EXPOSITION
 9E ART+/ FIBD

À l’occasion du centième anniversaire de sa naissance, le Festival d’Angoulême organise une grande rétrospective autour de l’œuvre de Shigeru Mizuki. L’occasion de découvrir le travail de cet artiste décisif au destin romanesque, qui s’est notamment illustré par ses récits de guerre et ses mangas d’horreur.

En 2006, le public français découvre Shigeru Mizuki grâce à NonNonBâ (Éditions Cornélius), un récit racontant la vie d’une vielle femme superstitieuse obsédée par les yõkai. L’année suivante, le manga obtient le Prix du Meilleur Album au Festival d’Angoulême. Son auteur a 85 ans, et se réjouit de voir que ses histoires de monstres et de fantômes touchent encore le cœur du public.

Né en 1922 à Sakaiminato, petite ville côtière du sud-ouest du Japon, Shigeru Mura, alias Shigeru Mizuki, est très tôt fasciné par le dessin. Il a la chance d’avoir son père qui l’incite à persévérer dans cette voie. Malheureusement, la guerre vient tout gâcher. À vingt ans, il est mobilisé par l’Armée impériale japonaise, puis envoyé dans la jungle de Nouvelle-Guinée où il va vivre un véritable cauchemar. Après avoir assisté à la mort de bon nombre de ses frères d’armes, il perd son bras gauche lors d’un bombardement et contracte bientôt la malaria. À son retour au Japon, il abandonne ses rêves de dessin et touche à tous les métiers pour survivre : poissonnier, taxi-vélo, dessinateur de kamishibai*. Surmontant ses traumatismes, il publie finalement son premier manga, Rocketman, en 1957.

Par la suite, Shigeru Mizuki va accompagner toutes les transformations de l’industrie du manga. Il est l’un des pionniers du manga d’horreur, se spécialisant dans les histoires mettant en scène des yõkai, ces créatures étranges issues du folklore fantastique local. Il est également connu pour ses récits qui dépeignent l’absurdité et la violence de la Guerre du Pacifique. Décédé en 2015, à l’âge de 93 ans, il laisse derrière lui une œuvre plurielle et incroyablement cohérente, où la petite et la grande Histoire s’entremêlent et où le fantastique contamine le quotidien dans un geste poétique.

*KAMISHIBAI Forme d’art populaire japonais qui consiste à faire défiler des panneaux peints comme des diapositives pour raconter une histoire.

TATSUKI FUJIMOTO, HÉROS DU CHAOS

L’ALPHA – MÉDIATHÈQUE

COMMISSAIRE
FREDERICO ANZALONE

SCÉNOGRAPHE
LA FABRIQUE CRÉATIVE

PRODUCTION
9E ART+/ FIBD

Révélé avec deux séries coups de poing – Fire Punch et Chainsaw Man, publiées chez Kazé -, Tatsuki Fujimoto est l’une des nouvelles étoiles montantes du manga. Véritable immersion dans le cosmos créatif d’un auteur au trait fulgurant, cette exposition ouvre les portes d’un univers baroque, entre super héroïsme disruptif et intimisme bouleversant.

Il n’aura fallu que deux séries à Tatsuki Fujimoto pour s’imposer au sein de la très prestigieuse écurie Jump, magazines/label de l’éditeur Shūeisha d’où sont issus des best-sellers internationaux tels que Dragon BallHunter x HunterBleachNarutoOne Piece ou encore Demon Slayer. Révélé avec Fire Punch (Kazé) – un shōnen manga dans lequel certains des derniers survivants de entreprises de déconstruction de la figure l’espèce humaine ont développé des capacités surnaturelles pour traverser une nouvelle ère glacière -, le mangaka confirme son immense potentiel avec Chainsaw Man (Kazé) (récemment récipiendaire du Harvey Award du Meilleur Manga), où il met en scène un improbable être mi-humain, mi-démon à tête de tronçonneuse.

Grâce à des partis pris audacieux, ce jeune auteur au style polymorphe parvient, comme par miracle, à réaliser ce que bon nombre de ses pairs rêvent de faire : accoucher d’une œuvre qui séduise à la fois le grand public et les lecteurs en quête de récits plus expérimentaux. Ainsi, ses deux séries apparaissent autant comme de brillantes entreprises de déconstruction de la figure du super-héros que comme des histoires délirantes calibrées pour un lectorat en quête d’adrénaline. Dans ces dernières, Tatsuki Fujimoto y maltraite avec brio les codes du genre et parvient, derrière la frénésie de séquences d’action épiques, à exprimer avec une finesse d’écriture rare les dilemmes moraux de personnages bien plus complexes qu’il n’y paraît. Sa dernière création en date, l’autofiction intimiste Look Back (3 millions de lecteurs en à peine 24 heures après sa mise en ligne sur la plateforme Manga Plus de l’éditeur Shūeisha), confirme cette tendance de fond et assoit encore un peu plus le statut d’auteur culte de Tatsuki Fujimoto.